Philippe Georget a conquis son public avec trois romans récompensés par des prix littéraires qu’il collectionne. Rencontre avec un écrivain talentueux du pays Catalan.

 


Tout d’abord, pouvez-vous résumer votre parcours jusqu’à l’écriture ?

Âgé de 53 ans, je suis journaliste dans l’audiovisuel public depuis 1988. J’ai d’abord travaillé dans les locales de Radio-France (un peu partout dans l’Hexagone) avant de me faire embaucher à France 3. À Orléans d’abord puis à Perpignan.georget14sept2012nb-jpg
J’ai eu pendant une quinzaine d’années des velléités d’écriture, à savoir que j’ai commencé plusieurs livres sans jamais aller jusqu’au bout. Parce que le parcours de l’écrivain jusqu’au lecteur ressemblait trop à un parcours du combattant et que je me suis souvent découragé, doutant de mes capacités et de ma chance, et trouvant dans d’autres loisirs une meilleure détente pour un journaliste-père de trois enfants adorables mais exigeants.

Pourquoi le genre du polar ?

Je me suis tourné naturellement vers le polar parce que j’en lisais pas mal et que, bêtement, j’ai cru que, sous prétextes que c’était des romans faciles à lire, ce serait un livre facile à écrire. J’ai très vite déchanté. Car si l’auteur de polar doit construire une intrigue charpentée et captivante, il ne doit pas pour autant négliger tout le reste, le style, le décor, la psychologie.

Dans Méfaits d’hiver, Gilles Sebag cumule les faits divers, aussi bien personnels que professionnels. Il rejoint ainsi la cohorte des flics malheureux.

Pourquoi, d’après vous, les flics de la littérature sont-ils si peu vernis personnellement ?

Je n’ai pas tout à fait le même sentiment que vous sur mon personnage. J’ai « construit » Gilles Sebag justement en opposition aux héros que j’estimais avoir trop souvent rencontré dans mes lectures, à savoir des flics mal embouchés, qui consacrent toute leur vie à leurs enquêtes et qui par conséquent se retrouvent obligatoirement divorcés et fâchés avec leur progéniture. Gilles Sebag a deux enfants merveilleux dont il s’est toujours bien occupé, deux enfants qu’il aime et qui le lui rendent bien. Il a aussi une femme charmante dont il est toujours follement amoureux, qui l’aime aussi, même si cet amour possède sa part d’ombres. Bref, il s’agit d’un héros heureux en famille, bien dans son couple du moins jusqu’à ce que… Et oui, « comme les gens heureux n’ont pas d’histoire », il a bien fallu que je lui créé quelques déboires. Après une montée progressive de ses inquiétudes dans les deux romans précédents, Gilles Sebag traverse effectivement une très mauvaise passe dans Méfaits d’hiver. Mais son couple et sa famille n’explosent pas et Sebag se montrera peut-être (?) capable de surmonter l’épreuve. À suivre au prochain épisode.

Quels sont les auteurs qui vous ont influencé ?

C’est une question à laquelle les auteurs n’aiment pas trop répondre car nous préférons parfois vivre et travailler dans l’illusion de faire partie d’une sorte de génération spontanée, sans filiation et sans héritage. Mais si vous m’obligez à être honnête, j’avouerai sous la torture 😉 que parmi mes lectures, celle des romans de Mankell m’a sans doute beaucoup inspiré pour la construction de mes romans et celle d’Izzo pour le style et cette ambiance toute imprégnée d’un humanisme mélancolique.

Comment travaillez-vous ? Papier ? Ordinateur ?

Je travaille essentiellement sur l’ordinateur mais il m’arrive de plus en plus de sortir du confinement et de la solitude de mon bureau pour écrire au-dehors, sur un carnet. C’est peut-être une conséquence de mon métier de journaliste et de l’habitude d’écrire dans une rédaction mais je suis souvent plus concentré sur mon travail entouré de vie et de bruits.

Comment vient l’inspiration ?

Comme elle peut et parfois elle peut peu. Je suis incapable de préparer un plan très construit avant de me lancer dans l’écriture proprement dite. Les personnages mais aussi les décors m’imposent leurs choix. L’histoire chemine à leur rythme et s’élabore avec eux. Je navigue à vue une partie du livre, avant de tout reprendre depuis le départ (une ou deux fois, parfois plus) pour remettre un peu d’ordre et de cohérence dans le capharnaüm, reprendre un cap et m’y tenir.

Quels sont vos projets d’écriture ? 

Depuis mon premier roman paru en 2009, j’écris un roman sur deux avec mon personnage fétiche de flic perpignanais et les décors du pays catalan. Une fois ce roman terminé, je suis toujours impatient de quitter ces deux amis pour découvrir d’autres personnes et d’autres paysages.
Je pense rester encore un temps sur ce rythme. Les aventures de Gilles Sebag se déroulant par saisons, été, automne puis hiver, elles étaient prévues pour se clore un printemps. Mais comme ce personnage semble plaire – en France comme à l’étranger – et que j’aurai sans doute du mal moi aussi à m’en séparer, il est fort probable que je lui fasse jouer quelques prolongations.